De l’extrême-gauche au FN, les militants politiques, élus ou pas, sont présents sur internet. Tour à tour relais d’opinion, agitateurs d’idées ou critiques véhémentes, ils prennent part au débat démocratique depuis leur blog, un forum de discussions ou une page Dailymotion…
Véronique Miquelly est conseillère municipale UMP à Auriol, dans les Bouches-du-Rhône. L’un de ses dadas à elle, c’est Dailymotion. Jeudi 4 février en soirée se tenait un meeting de campagne à Aix-en-Provence en présence de nombreux élus, Thierry Mariani en tête. Le vendredi 5 au petit matin, on retrouvait en ligne sur sa page Dailymotion les vidéos des principales interventions de la soirée. Plus rapide qu’un site d’infos en ligne, plus efficace que le plus habile des bloggeurs politiques.
Il y a deux ans, Véronique Miquelly a lancé son blog personnel à l’occasion des élections municipales. Une page Facebook et un compte sur Dailymotion en sus. Aujourd’hui, assistée de deux militants, elle alimente régulièrement ses trois supports internet. « Un meeting auquel ont assisté cinq cents personnes pourra être vu par 3000 autres grâce à Internet », explique celle qui est aujourd’hui colistière de Thierry Mariani aux Régionales (16e position dans les Bouches-du-Rhône). Une façon de faire campagne et « de participer à faire vivre la démocratie ».
Militants-internautes et réseaux sociaux
Le rôle des « militants-internautes » au cours des campagnes électorales n’est pas tout à fait un sujet nouveau. Ce qui l’est désormais, c’est la maîtrise avec laquelle ils ont utilisent les codes et outils d’internet. Les dernières grandes campagnes électorales ont apporté la preuve éclatante de la place essentielle que pouvait jouer les réseaux sociaux pour informer et mobiliser l’opinion. Il n’y a qu’à voir le rôle central joué par internet dans la campagne et la victoire de Barack Obama aux Etats-Unis.
Sébastien Bedini, son truc à lui, ce serait plutôt Twitter. Militant socialiste dans le Var, secrétaire de section à Besse sur Issole, à une encablure de Brignoles, il gazouille depuis déjà de nombreux mois sur le réseau social de microblogging.
Son profil affiche 232 « followers » (ceux qui le suivent) et 566 tweets postés. Bonne moyenne pour un usager de Twitter en région. Parmi ses dernières infos, un lien vers la fameuse vidéo montrant Christian Estrosi, le maire UMP de Nice, appeler à voter pour le PS en Bourgogne ou l’annonce d’un débat sur la place des femmes en politique en Paca.
Les militants comme Sébastien Bedini se comptent par dizaine aujourd’hui, de gauche comme de droite. Au MoDem, par exemple, les sympathisants sont très très présents sur internet. Chez François Bayrou, on aime internet. Une manière aussi de faire circuler une parole qui peut être différente ou plus nuancée que celle des leaders.
MoDem, le cas d’école ?
Même si certains blogueurs préfèrent garder l’anonymat, d’autres n’hésitent pas à prendre la plume et à signer de leur nom des articles qui peuvent parfois révéler des divergences lourdes au sein d’une formation politique.
Ces dernières semaines par exemple, c’est la quête d’une tête de liste qui a enflammé la blogosphère du MoDem. Sur son blog, Thierry Tamisier, militant à Port-Saint-Louis-du-Rhône (Bouches-du-Rhône), est notamment revenu par le menu sur la situation qui a conduit à la désignation de Catherine Levraud comme tête de liste.
Il a ainsi raconté les tractations en interne et décrypté, dans deux posts dont un n’est plus aujourd’hui directement accessible sur son site, une situation dont François Bayrou et ses leaders locaux ont tenté de minimiser l’impact. Ainsi, écrivait-il le 1er février dernier:
Principe démocratique oblige, la candidature de Catherine Levraud devait être approuvée par les militants qui se sont prononcés par vote électronique entre le 18 et le 20 janvier, alors que son nom avait déjà été annoncé sans réserve à la presse, et les différents responsables de campagne officiellement désignés. Mettre ces démarches dans l’ordre aurait pu donner aux adhérents l’impression que leur avis était attendu à défaut d’être entendu… »
Europe Ecologie ou le tout « réseau social »
Or, précisément, que des voix dissonantes puissent se faire entendre est plutôt sain et témoignerait d’une certaine forme de liberté intéressante pour les militants au sein de leur propre formation. Ce qui n’est pas toujours le cas dans le cadre du fonctionnement disons traditionnel d’un parti.
C’est pour casser ces logiques traditionnelles et ces rapports leaders-militants de base que le mouvement Europe Ecologie a développé son « réseau social ». Fort de l’impact qu’il a eu l’an dernier au moment des élections Européennes, EE a donc renouvelé l’expérience pour les Régionales 2010 avec une plate-forme interactive sur laquelle se retrouvent les militants écolos des quatre coins de France.
Avec un risque cependant pour les internautes: s’éparpiller.
L’extrême-droite… une présence redoutable sur la toile
Parmi les militants les plus actifs sur le web, on retrouve évidemment ceux d’extrême-droite. En Paca, le mouvement identitaire, engagé pour les régionales au côté de Jacques Bompard sur la liste Ligue du Sud, est très présent sur le net. Et très bien organisé. La toile d’araignée tissée par Nissa Rebela, par exemple, participe à rendre visible la Ligue du Sud du maire d’Orange.
Les forums de discussion des différents sites identitaires sont généralement très suivis. Y compris d’ailleurs par les militants de l’autre bord de l’échiquier politique…
L’outil de propagande est efficace et pourrait bien finalement participer à faire de l’ombre au FN de Jean-Marie Le Pen. Mais remporter la bataille du web ne se traduira pas forcément par une victoire dans les urnes.
Car, au fond, quel impact peut avoir ce militantisme virtuel au cours d’une campagne électorale comme celle des Régionales ? L’échelon local du scrutin favorise-t-il le développement de l’e-activisme politique ? Les blogs des uns et les vidéos des autres auront-ils, finalement, un effet sur la mobilisation de l’électorat?
► La page Dailymotion de Véronique Miquelly
► Le compte Twitter de Sébastien Bédini
► Le blog de Thierry Tamisier
► Le réseau social d’Europe Ecologie
► Le site de Nissa Rebela
Au-delà des querelles, le Modem, en utilisant le vote par internet, montre un mépris inquiétant de ce qui caractérise les élections démocratiques : la TRANSPARENCE.
Pour en savoir plus, on peut prendre connaissance de la position de l’ASTI, fédération de 30 associations professionnelles et scientifiques d’informaticiens :
«l’ASTI recommande que […] pouvoirs publics, partis politiques et société civile ne recourent en aucune manière au vote électronique anonyme »
http://www.ordinateurs-de-vote.org/Communique-du-20-decembre-2007-Une,10360.html
Il est important de reprendre contact avec la réalité, loin des mondes virtuels (dés)enchantés, et de signer et faire signer la pétition nationale pour le maintien du vote papier (déjà plus de cent mille signatures) http://www.ordinateurs-de-vote.org/petition/