Pas à dire. Pour éviter les vagues et remous qui accompagnent depuis plusieurs jours les débats sur l’identité nationale, s’inspirer de Marseille pourrait être la solution pour Eric Besson. C’était « l’identité nationale entre soi » a relevé un collègue journaliste. Concept local: une salle municipale relativement vaste mais plutôt haut de gamme – celle de l’Alcazar, bibliothèque à vocation régionale -, une présence autorisée après inscription en préfecture, une date de réunion fixée in-extremis et surtout, surtout, ne pas inviter de ministre du gouvernement !
Dans ces conditions, aucun risque de dérapages possible. Même la poignée d’infiltrés du FN qui s’étaient mêlés à la joyeuse assemblée n’ont pas trop osé la ramener, par peur de se faire admonester par le reste des convives.
Et pourtant, il y avait de l’enjeu à causer identité nationale à Marseille. Un peu plus tôt dans la journée sur les ondes de France Inter, Jean-Marie Le Pen et Renaud Muselier (encore présenté par Le Monde comme 1er adjoint au maire de Marseille, ce qui fera plaisir à Roland Blum) avaient échangé poliment sur le sujet.
Le leader du FN, tout en rappelant pour la xième fois que Sarkozy était venu chasser sur ses terres, a estimé que le débat « posait la question de l’immigration qui, jusqu’ici, était considérée comme taboue ». Renaud Muselier a répliqué en jouant la corde de la Marseille cosmopolite qui ne serait pas ce qu’elle est sans l’immigration.
Tout ceci avant que la discussion ne dévie inévitablement sur la taille du minaret de la future grande mosquée de Marseille (et sur sa légitimité même…)
Pas la foule des grands soirs…
Le plus curieux, dans le débat marseillais, c’est qu’il n’a pas attiré les foules. La salle de la grande bibliothèque était loin d’être comble. Christophe Reynaud, le secrétaire général adjoint de la préfecture des Bouches-du-Rhône a pourtant mis beaucoup de conviction dans son « votre présence témoigne de l’intérêt que suscite cette initiative », personne ne l’a cru…
Une poignée d’élus municipaux UMP, des représentants religieux, associatifs, communautaires, des anciens combattants, quelques caméras et une moyenne d’âge proche de celui de la ménagère. Si bien d’ailleurs que lorsqu’un ancien combattant a souhaité « s’adresser aux jeunes » pour leur rappeler l’importance de l’histoire, il a en fait prêché dans une zone semi-désertique. Tels ont été les principaux ingrédients d’une soirée sans coupure électrique…
Identité-singularité…
Globalement, les débats ont été plutôt courtois et relevés, avouons-le. Parmi les quatre intervenants invités à « introduire » la thématique, le sociologue aixois Raphaël Liogier aura fait prendre un peu de hauteur à la chose en jouant, entre autre, sur les confusions entre identité et singularité (« L’identité c’est la ressemblance, c’est presque, d’une certaine façon, une négation de ma singularité ») ou encore sur cette « gigantesque mise en scène qu’est la République » au sein de laquelle chacun a un rôle assigné. Une définition de l’identité ?
Une bonne intervention également, saluée par quelques applaudissements, d’une femme assise précisément entre l’ex-candidat du Front National aux municipales de 2008, Stéphane Ravier et l’élu municipal du FN, Bernard Marandat. Ce qui au demeurant ne présage en rien de son appartenance à un parti d’extrême-droite. « Est-ce un débat politique, a-t-elle interrogé, ce qui, à trois mois d’élections régionales, me laisse évidemment penser qu’il s’agit d’une démarche électoraliste; ou est-ce un débat philosophique, pour lequel il n’est pas envisageable d’aboutir à des conclusions péremptoires ? Mais cela ne peut pas être les deux en même temps… »
« L’identité c’est 1/3 de fierté, 1/3 d’honneur et le dernier vous le mettez où vous voulez »
Un jeune homme a souhaité replacer les « valeurs de la République au-dessus de tout », s’emportant contre « le communautarisme à l’anglo-saxonne » qui, selon lui, « est un échec »: « Ils le savent mais, par orgueil, ne le reconnaissent pas ». Une femme plus âgée: « Tant que l’on continuera à nomme différemment les personnes issues de, on stigmatisera une partie de la population… » Plus loin:
« L’identité c’est un tiers de fierté, un tiers d’honneur et le dernier vous le mettez où vous voulez ».
Et encore:
« Réduire quelqu’un à une seule de ses appartenances peut le condamner à la persécution ».
Une dernière, sous forme de dédicace:
« Je peux être français et porter ma casquette à l’envers ».
Liogier toujours : « Depuis vingt ans, le problème, c’est l’intégration. Les politiques d’intégration s’obstinent à imposer un portrait-robot de manière parfaitement caricaturale de ce que doit être un Français ». Il aura été également question de fronton des mairies, de drapeau et de fromages. De La Marseillaise aussi, chantée pour la première fois à quelques rues de là, rue Thubaneau, où les travaux du mémorial de la Marseillaise justement viennent de démarrer.
Un débat si sage qu’il n’y aura pas eu un mot vraiment plus haut que l’autre. Pas d’empoignades, pas même de vieilles phrases racistes et nauséabondes. Comble, il aura fallu que le dernier intervenant évoque un précédent débat à Cavaillon pour qu’on ressente le climat malsain qui entoure le grand débat sarkozyste partout en France depuis plusieurs jours et qui, comme par enchantement, était resté aux portes de la deuxième ville de France. Sans le déplorer bien sûr…
Le 15 janvier 2010, Eric Besson pourrait venir à Marseille poursuivre la discussion. L’ambiance devrait être autrement électrique…
Je ne savais même pas qu’un débat était organisé à Marseille !
Chut… ne le dit pas trop fort !!!
et pendant ce temps là, les Résistants étaient qd même quelques 600 au Dock des Suds…
c’est un peu fort de café : un rendez-vous organisé, sans publicité, au coeur même des idées de M. Sarkozy… le pire était-il à craindre, ou ces messieurs organisateurs préfèrent-ils discuter entre eux?
Qui sait quand, où et comment s’organise un autre debat à marseille en janvier 2010?
Eric Besson est confirmé le 15 janvier prochain à Marseille. Le débat sur l’identité nationale aura lieu dans les salons d’honneur du Vélodrome de 18 à 19h…
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